Les programmes de développement de la petite enfance que le gouvernement fédéral supervise directement sont souvent embourbés dans le dédoublement des lois et la réglementation outrancière, sans compter que la responsabilité n’est pas claire en matière de prestation. L’ambiguïté de la gouvernance prédomine et elle fait en sorte de compliquer l’efficacité du financement et de compromettre l’accès aux programmes, ainsi que leur qualité et leur responsabilité. Le gouvernement provincial fait face aux mêmes défis.
Tableau 5.3
Les services à la petite enfance sont partagés entre les programmes de développement, de formation au rôle de parent et de garde. La maternelle est offerte comme un prolongement de l’éducation publique, un droit pour tous et sans frais. Les programmes de formation au rôle de parent sont subventionnés par des commanditaires publics et communautaires. Là où ils sont offerts, ils sont généralement peu coûteux, voire sans frais pour les parents. La maternelle et les programmes de formation au rôle de parent ne comblent pas les besoins extérieurs au milieu familial, lesquels reviennent aux services de garde. Cependant, avec peu de soutien public, les services de garde sont inflexibles,24 fragmentés, irresponsables et vulnérables.25
En 2006, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a lancé Petite enfance, grands défis, l’étude la plus complète en matière de développement et de soins de la petite enfance jamais réalisée. Cette étude, menée auprès de 15 pays et échelonnée sur huit ans, a révélé que dans les instances où les politiques et la prestation en matière d’éducation et de services de garde étaient divisées, des défis similaires se posaient :
Les fournisseurs de services sont également mis à l’épreuve :
Le profil de l’OCDE en matière de développement de la petite enfance au Canada correspond malheureusement au profil décrit ci-dessus.26 Les défis en matière de financement et d’accès ont été soulignés, tout comme l’absence de lois cohérentes et de cadres stratégiques. Selon l’OCDE, un plus grand investissement public est nécessaire, mais sa répartition l’est tout autant. Early Years Study 2 se fondait sur les observations de l’OCDE et suggérait de fusionner les silos de services en un seul système conforme à l’éducation publique en ce qui a trait aux programmes, aux politiques et à la gestion. L’éducation des jeunes enfants constituerait le but principal du système, mais les programmes devraient également parrainer le rôle des parents et être organisés de manière à faciliter le travail et l’horaire des familles. Le rapport encourageait les gouvernements à consulter les parties intéressées afin d’élaborer des stratégies comportant des priorités, des standards, des échéanciers et des budgets garantis visant à financer une gouvernance et une expansion appropriées.
Depuis, les décideurs politiques, les universitaires, les parents et les éducateurs conviennent que les programmes de développement de la petite enfance devraient être structurés de manière à s’assurer que tous les enfants commencent l’école prêts à réussir. Dans le cadre de l’Éducation au Canada – Horizon 2020 : déclaration conjointe des ministres provinciaux et territoriaux de l’Éducation,27 les années préscolaires représentaient le premier des quatre piliers de l’apprentissage tout au long de la vie. Selon la déclaration, tous les enfants devraient avoir accès à une éducation de grande qualité en début de vie. D’autres politiques publiques et documents de recherche convergent en ce sens en déterminant que les programmes de développement de la petite enfance constituent un moyen important de réussir à l’école.28
Encouragés par les exigences des ententes fédérales et provinciales/territoriales en matière d’apprentissage en début de vie et de service de garde et par une compréhension plus mature du rôle que doit jouer la politique dans le soutien du développement pendant la petite enfance, les provinces et les territoires adoptent une vision plus globale de ce que représentent les premières années. La plupart des provinces et des territoires ont mis sur pied des cadres stratégiques comportant des visions et des objectifs. Les ministères de l’Éducation encouragent de plus en plus activement l’apprentissage chez les jeunes enfants. Une plus grande attention est portée aux méthodes d’enseignement dans les installations de la petite enfance et des efforts ont été faits pour améliorer la formation des éducateurs. En Alberta, l’une des trois priorités du ministre de l’Éducation consiste à évaluer les options visant à permettre aux enfants de profiter de possibilités d’apprentissage en début de vie. En Colombie-Britannique, l’apprentissage en début de vie fait partie des directives des écoles et a donné lieu à un cadre d’enseignement pour les programmes de développement de la petite enfance. Le plan quinquennal du Manitoba vise à renforcer les partenariats entre les écoles et les services de garde.29
Une tendance consiste à élire un ministère directeur responsable des services à la petite enfance. L’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, la Saskatchewan, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ont entrepris des démarches afin de combiner leurs ministères de l’Éducation et du Développement de la petite enfance. Au Québec, les écoles sont responsables des programmes parascolaires pour les enfants âgés de 5 à 12 ans depuis 1998.
Tableaux 5.4 et 5.5
Les parties intéressées ont émis des préoccupations justifiées sur le fait que les écoles ne comprennent pas suffisamment la capacité d’apprendre des jeunes enfants, de manière à miser sur le travail de base qu’effectuent les communautés. Certaines provinces et certains territoires ont mis sur pied des divisions particulières au sein de leur ministère de l’Éducation afin de combler les besoins uniques des jeunes apprenants.
Toutefois, assigner le développement de la petite enfance au ministère de l’Éducation représente parfois le seul geste posé en la matière. Sur le terrain, la prestation des services demeure partagée entre les services de garde et l’éducation. Les parents éprouvent encore de la difficulté à trouver des services abordables et fiables, et les fournisseurs de services continuent de répondre aux divers modèles de financement et de réglementation.
Créer un système d’éducation de la petite enfance à partir d’un ensemble de services n’est pas simple. La tâche requiert de nouvelles lois et de nouveaux règlements, mais aussi le regroupement des orga-nismes et la modification des dispositions en matière de financement, de description de postes et de pratiques en ce qui a trait au recrutement et à la formation. Intégrer l’éducation et les services de garde n’est pas un processus cumulatif. En soi, les protocoles de partenariat et les discussions des parties intéressées visant à mieux coordonner les services entraînent souvent le statu quo. L’élaboration d’un système nécessite un changement de paradigme de notre compréhension des vraies circonstances dans lesquelles les jeunes enfants vivent et des moyens à prendre en conséquence. Chaque province ou territoire peut s’améliorer.
Prochain: 3.2 Élaboration des politiques : les provinces et les territoires - financement
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